La religion joue un rôle fondamental dans la vie quotidienne et l’identité culturelle du Sri Lanka. Avec environ 99 % des Sri Lankais déclarant que la religion est importante dans leur vie quotidienne, le pays se classe parmi les plus religieux au monde. Cette petite île de l’océan Indien abrite une diversité religieuse et ethnique impressionnante, qui influence non seulement les croyances spirituelles mais aussi la politique, la culture et la société. Cet article explore les différentes religions pratiquées au Sri Lanka, leur histoire et leur impact sur la vie moderne.
Les principales religions au Sri Lanka
Le Bouddhisme
Le bouddhisme est la religion majoritaire au Sri Lanka, avec environ 70,2 % de la population adhérant au bouddhisme Theravāda. Introduit au Sri Lanka autour de 246 avant notre ère par Arahath Mahinda, le bouddhisme a profondément influencé l’histoire et la culture du pays. Le roi Devanampiya Tissa, converti par Mahinda, a joué un rôle crucial dans l’établissement du bouddhisme comme religion d’État. La plantation du Sri Maha Bodhi à Anuradhapura, un arbre sacré issu du figuier sous lequel Bouddha aurait atteint l’illumination, est un symbole majeur du bouddhisme au Sri Lanka.
Au fil des siècles, le bouddhisme a traversé des périodes de déclin et de renouveau, notamment grâce aux contacts avec les moines thaïlandais et birmans. La période coloniale, marquée par la domination portugaise, néerlandaise et britannique, a également vu des fluctuations dans la prééminence du bouddhisme. Notamment, le mouvement national bouddhiste lancé au milieu du XIXe siècle par des figures comme Anagarika Dharmapala a joué un rôle crucial dans la revitalisation de cette religion.
L’Hindouisme
Avec 12,6 % de la population adhérant à l’hindouisme, cette religion est principalement pratiquée par la communauté tamoule du Sri Lanka. L’hindouisme a précédé le bouddhisme sur l’île, influençant les cultures locales bien avant l’arrivée du bouddhisme Theravāda. Les Tamil hindous, concentrés dans les provinces du Nord et de l’Est, pratiquent un large éventail de traditions religieuses et vénèrent de nombreuses divinités, à la fois principales et régionales.
Un personnage notable dans l’histoire moderne de l’hindouisme au Sri Lanka est Satguru Siva Yogaswami de Jaffna. Considéré comme un mystique du XXe siècle, Yogaswami a exercé une influence considérable sur la communauté tamoule hindoue. La philosophie Shaiva Siddhanta prédomine parmi les hindous du Nord du Sri Lanka.
L’Islam
Les musulmans représentent environ 9,7 % de la population, principalement issus des communautés ethniques maures et malaises. L’Islam a été introduit au Sri Lanka par les commerçants arabes au VIIe siècle. Bien que ces premiers musulmans aient prospéré grâce au commerce, ils ont fait face à des persécutions lors de la domination portugaise au XVIe siècle, forçant de nombreux musulmans à se déplacer vers les zones côtières du centre et de l’est.
Aujourd’hui, la communauté musulmane dispose de son propre Département des Affaires Religieuses et Culturelles, créé dans les années 1980 pour éviter l’isolement de cette communauté par rapport au reste du pays. Quant aux femmes qui voyagent au Sri Lanka, elles doivent respecter les coutumes et les traditions locales pour assurer un séjour respectueux et harmonieux.
Le Christianisme
Le christianisme, bien que minoritaire avec 7,4 % de la population, possède une histoire riche et complexe au Sri Lanka. Des traces de chrétiens persans nestoriens sur l’île au VIe siècle jusqu’à l’arrivée des missionnaires portugais, néerlandais et britanniques entre le XVIe et le XIXe siècle, cette foi a profondément marqué l’histoire religieuse de l’île. Les catholiques, principalement ramenés par les missionnaires portugais, constituent la majorité des chrétiens au Sri Lanka.
La foi Bahá’íe
Présente depuis 1949, la foi Bahá’íe a pris racine au Sri Lanka grâce à des pionniers venus d’Inde. Bien que petite en comparaison des autres religions, la communauté bahá’íe contribue à la diversité religieuse de l’île.
L’impact de la religion sur la société sri lankaise
Attitudes envers la diversité religieuse
Contrairement à ce que l’on pourrait attendre d’un pays marqué par des décennies de conflits ethniques et religieux, les Sri Lankais montrent un haut degré de tolérance envers les différentes religions. Selon une étude, 60 % des Sri Lankais ont une opinion positive de la diversité religieuse, ethnique et culturelle. Les Bouddhistes, par exemple, se montrent ouverts à l’idée de vivre à côté de voisins hindous, chrétiens et musulmans. De manière similaire, la grande majorité des Hindous se disent prêts à avoir des voisins bouddhistes.
Cependant, il existe des nuances. Tandis qu’environ 70 % des Sri Lankais considèrent l’hindouisme et le christianisme comme compatibles avec la culture sri lankaise, seulement 50 % pensent de même pour l’Islam. Cela démontre une certaine réserve vis-à-vis des musulmans, bien que ces attitudes aient évolué au fil du temps.
Les interactions entre religions
Une particularité intéressante révélée par l’étude est que de nombreux Sri Lankais prient des divinités d’autres religions. Par exemple, 40 % des bouddhistes sri lankais déclarent prier ou rendre hommage à Allah, tandis que 60 % prient Jésus et 80 % Ganesh. Ce syncrétisme spirituel est relativement unique au Sri Lanka et témoigne de la fluidité des pratiques religieuses sur l’île.
Religion et politique
Bien que la constitution sri lankaise garantisse la liberté religieuse, elle accorde une place prépondérante au bouddhisme, désigné comme ayant la « place la plus importante ». Cette priorité constitutionnelle a souvent suscité des débats sur la laïcité et le rôle de la religion dans la politique. Les bouddhistes sri lankais soutiennent l’idée de baser les lois nationales sur les enseignements bouddhistes, expliquant la réticence des gouvernements à modifier cette priorité constitutionnelle.
Participation politique des religieux
L’étude révèle également que, malgré la forte importance accordée à la religion, une majorité de Sri Lankais préfèrent que les religieux restent en dehors de la politique. Seulement 30 % des bouddhistes sri lankais souhaitent que les moines s’expriment sur les politiciens ou les partis politiques qu’ils soutiennent, et un maigre 20 % approuve que les moines entreprennent des carrières politiques.
Le rôle des moines et des leaders religieux
Malgré cette réserve vis-à-vis de l’implication politique directe des religieux, presque tous les partis politiques sri lankais ont une aile bhikku (moine). Les moines senior soutiennent souvent publiquement des partis politiques, bien que cela soit impopulaire parmi la population générale. Les appels sur les réseaux sociaux pour que les moines restent apolitiques et transcendent la politique partisane lors de discussions d’importance nationale sont de plus en plus fréquents.
L’impact de l’éducation et de l’urbanisation
Contrairement à d’autres pays où l’engagement religieux tend à diminuer avec l’éducation et l’urbanisation, le Sri Lanka présente une tendance inverse. Environ 90 % des Sri Lankais instruits et presque 100 % des moins instruits accordent de l’importance à la religion. En milieu rural, 90 % de la population considère la religion comme importante, contre 95 % en milieu urbain.
Impact historique et culturel
Guerre civile et religion
Le conflit le plus dévastateur de l’histoire récente du Sri Lanka, la guerre civile de 1983 à 2009, fut principalement motivé par des tensions ethniques et non religieuses. Ce conflit entre les Tigres tamouls, représentant la minorité ethnique tamoule, et le gouvernement majoritairement cinghalais, a fait plus de 100 000 morts.
Les racines de cette guerre trouvent leur origine dans la période coloniale britannique, lorsque les Tamouls étaient souvent favorisés dans l’éducation et les nominations officielles. Après l’indépendance en 1948, le pouvoir est passé aux mains de la majorité cinghalaise, créant ainsi un déséquilibre de pouvoir qui a mené au conflit armé.
Les religions après la guerre
Après la fin de la guerre en 2009, le Sri Lanka a entrepris des efforts de reconstruction et de réconciliation, où la religion continue de jouer un rôle crucial. Les temples bouddhistes, les kovils hindous, les mosquées musulmanes et les églises chrétiennes, tous témoignent de la résilience et de la diversité culturelle du pays. Des initiatives gouvernementales et privées visent à favoriser l’harmonie et la compréhension inter-religieuse, même si les défis restent nombreux.
Le Sri Lanka est un microcosme fascinant de diversité religieuse et culturelle. De l’antique bouddhisme Theravāda aux influences plus récentes du christianisme et de l’Islam, chaque religion contribue à la mosaïque culturelle de l’île. Bien que des tensions existent, les Sri Lankais démontrent une capacité remarquable à embrasser la diversité religieuse, à célébrer des fêtes ensemble et à coexister malgré les différences. Pour ceux qui visitent le Sri Lanka, comprendre cette profondeur de foi et de tradition ajoute une dimension riche et inoubliable à toute expérience.